19 Oct Un groupe sélect : Une étude pourrait apporter une meilleure thérapie à des patients préidentifiés atteints de cancer du poumon
Des chercheurs de l’Institut Weizmann identifient un biomarqueur qui pourrait un jour permettre à un sous-groupe de patients atteints de cancer du poumon de bénéficier d’un traitement sans rechute.
Les non-fumeurs qui développent un cancer du poumon peuvent être traités efficacement avec de nouveaux médicaments, mais leurs tumeurs refusent de se rendre sans combattre. Les médicaments cessent d’agir à long terme parce que les tumeurs acquièrent des mutations secondaires qui leur permettent d’échapper à l’effet thérapeutique des médicaments.
Dans une recherche publiée dans la revue Cell Reports Medicine, des chercheurs de l’Institut Weizmann des Sciences font état de résultats qui pourraient conduire à un traitement sans rechute pour un sous-groupe important de patients atteints de cancer du poumon. Dans une étude menée sur des souris, les scientifiques ont identifié un biomarqueur qui pourrait aider les médecins à identifier les patients atteints de cancer du poumon qui peuvent être traités avec un seul médicament à base d’anticorps susceptible d’entraîner une rémission complète, sans rechute du cancer.
L’équipe de recherche de Weizmann. (g-d) Dr. Roni Oren, Anna Rudnitsky et Dr. Mirie Zerbib. Au premier rang (g-d) Nitin Gupta, Prof. Yosef Yarden et Dr Suvendu Giri.
« Nous avons découvert un biomarqueur potentiel qui pourrait changer la façon dont les patients atteints de cancer du poumon sont traités dans le monde entier », déclare le professeur Yosef Yarden du Département d’Immunologie et de Biologie Régénérative de Weizmann, qui a dirigé l’étude. « Tout comme la présence de mutations BRCA permet de prédire comment les patientes atteintes d’un cancer du sein ou de l’ovaire réagiront aux médicaments, ce nouveau biomarqueur pourrait permettre d’associer certains patients atteints d’un cancer du poumon au médicament spécifique le plus susceptible de les aider.
Se concentrer sur les mutations qui comptent
La plupart des cancers du poumon sont dus au tabagisme, mais la deuxième fraction la plus importante des cas touche les non-fumeurs et se caractérise par des mutations dans un gène appelé EGFR. Les recherches actuelles ont débuté lorsque le Dr Ilaria Marrocco, alors chercheuse postdoctorale dans le laboratoire du Prof. Yarden, a examiné la littérature des essais cliniques et s’est rendu compte que tous les patients atteints d’un cancer du poumon EGFR-positif étaient traités selon le même protocole multi-médicamenteux, indépendamment des 30 mutations connues de l’EGFR qui étaient présentes dans leurs tumeurs. Ces patients finissaient par développer une résistance aux médicaments qui entraînait une rechute du cancer. Le Dr. Marrocco s’est demandé si, en triant les tumeurs pulmonaires en fonction des mutations spécifiques de l’EGFR, il ne serait pas possible de créer un protocole médicamenteux plus personnalisé et d’obtenir de meilleurs résultats.
« L’observation du Dr Marrocco nous a incités à rechercher un biomarqueur qui permettrait de prédire quels patients répondraient bien à la thérapie, en fonction des mutations spécifiques dont ils sont porteurs », explique le Dr Yarden. Les scientifiques ont décidé de se concentrer sur l’une des deux variantes génétiques les plus courantes associées à l’EGFR dans le cancer du poumon : la mutation L858R, dans laquelle un seul acide aminé, le 858ème, sur 1186 est remplacé par un autre. Cette mutation est présente chez environ 40 % des patients atteints de cancer du poumon dont les tumeurs sont caractérisées par des mutations de l’EGFR.
Dr. Ilaria Marrocco
Les scientifiques ont choisi d’étudier la mutation L858R parce que, contrairement à d’autres mutations qui affectent l’EGFR, elle a un impact unique sur la fonction de l’EGFR. « Contrairement à toutes les autres mutations, cette mutation exige que, pour qu’ils soient actifs, les récepteurs s’associent dans la membrane de la cellule cancéreuse, après quoi les signaux ordonnant à la cellule de commencer à se répliquer sont envoyés au noyau », explique le Prof. Yarden. « En utilisant un modèle murin de cancer du poumon avec la mutation L858R, nous avons découvert que, si cet appariement ne se produit pas, c’est comme un court-circuit – le signal pour initier la réplication cellulaire ne peut pas être envoyé au noyau, et la tumeur ne se développe pas.
Les chercheurs ont ensuite bloqué l’appariement en traitant les souris avec un anticorps appelé cetuximab, connu sous le nom commercial d’Erbitux, développé sur la base des recherches du Prof. Yarden et de feu le professeur Michael Sela. Erbitux a été approuvé par la FDA pour le traitement des cancers du côlon et de la tête et du cou.
« Après le traitement par Erbitux, les tumeurs pulmonaires des souris ont diminué et ne sont pas réapparues, même après une longue période », explique le Prof. Yarden. « Ces résultats indiquent que, pour le grand nombre de patients atteints de cancer du poumon humain présentant la mutation L858R, un seul médicament pourrait offrir une voie vers une guérison complète, sans le phénomène dévastateur de la rechute du cancer. »
La nouvelle étude explique également pourquoi les tentatives précédentes de traitement du cancer du poumon muté par l’EGFR avec Erbitux ont échoué ou, au mieux, ont donné des résultats contradictoires. Le Prof. Yarden explique : « Depuis que les nouveaux inhibiteurs de l’EGFR ont été approuvés comme médicaments contre le cancer du poumon il y a près de 10 ans, tous les patients reçoivent désormais ces médicaments anti-EGFR, indépendamment de l’identité et du nombre de leurs mutations de l’EGFR. Ces médicaments sont très efficaces pendant un certain temps, mais ils permettent l’émergence de mutations secondaires qui accélèrent la rechute du cancer. Lorsque l’Erbitux est administré, il est généralement inefficace car il ne peut agir que contre certaines mutations de l’EGFR. Notre étude démontre l’importance de présélectionner les patients atteints de cancer du poumon qui peuvent être traités efficacement avec Erbitux dès le départ, sur la base de leur profil mutationnel ».
Selon les scientifiques, la prochaine étape consistera à lancer un essai clinique afin d’établir l’efficacité de ce traitement pour les patients humains atteints de cancer du poumon, ce qui sera facilité par le fait qu’Erbitux a déjà été approuvé pour le traitement d’autres types de cancer. En attendant, le Prof. Yarden et le Dr. Marrocco sont enthousiastes à l’idée que leurs recherches puissent avoir un impact sur la pratique clinique. Le Dr. Marrocco : « Le biomarqueur L858R pourrait contribuer à sauver des vies en offrant aux médecins un moyen de fournir un traitement médicamenteux personnalisé aux patients atteints de cancer du poumon qui sont porteurs de la mutation en question. »
La Science en chiffres
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, plus de 99 % de la population mondiale respire un air contenant des polluants qui dépassent les limites de concentration fixées par les lignes directrices mondiales de l’OMS sur la qualité de l’air pour 2021. La pollution de l’air ambiant et domestique provoque chaque année 6,8 millions de décès prématurés dans le monde, dont 11 % – 748 000 – sont attribués au cancer du poumon.